Emeute à la gare.
Nous voilà revenus aux plus beaux jours de 2002, juste avant une élection dont tout socialiste se souvient avec amertume. En ce temps-là, étaient aux affaires nos amis du PS, entre autres. Ce printemps-là, ont tout à coup explosé, ici et là, des incidents, des événements, des exactions, des vols à l’arrachée, des incivilités, dirait-on aujourd’hui. Tout concourait,- et les médias n’étaient évidemment pas en reste, on s’en doute !- à faire passer notre beau pays de France pour une espèce de coupe-gorge général. Tu n’osais plus rentrer le soir chez toi après 20 heures, tu allumais la radio le matin en te disant : qu’est-ce qui a bien pu se trafiquer cette nuit encore ? Manquait juste Gicquel « la France a peur !... » Bref, une psychose, un truc bizarre, qui te laissait, toi le démocrate, le républicain, un goût étrange, et pas venu d’ailleurs, celui-là… Jusqu’au jour où on a vu à la télé un petit pépé, le papy Voise, qu’on l’appelait, comme si c’était notre voisin, notre copain, Papy Voise par ci, Papy Voise par là, et on en a remis des couches, inimaginable. Il s’était fait « chauffer » par une bande de petits malfrats, sûrement pas assez malins pour organiser un vrai casse, pas assez courageux pour braquer un gros bourge bien repu de pognon. Ils l’avaient allumé, le papy, au sens propre du mot. On te le montrait sous toutes les coutures, avec ses bleus et ses bosses et son gros chagrin. La France entière devenait tout à coup la fille, la petite fille du pépé, alors que si ça se trouve, la veille encore, ses propres voisins le connaissaient à peine, on sait comment elle fonctionne notre si solidaire société. Tu peux bien crever dans ton coin, mais gaffe, si jamais une caméra se pointe, alors là, tout le monde est ton cousin ! Que croyez-vous qu’il arriva ? Ce que tous ceux qui écoutaient un peu ce qui se disait, ce qui se tramait, avaient compris depuis un moment : on s’est mis à penser que ces ministres-là, ils étaient des gros nuls, tout juste si c’était pas Jospin soi-même qui avait craqué l’allumette, et que finalement, le borgne, il saurait remettre tout ça en état de marche. Bilan de la manœuvre : le borgne au deuxième tour, comme on vous le dit. Plus que « le borgne au deuxième tour », c’est plutôt : « pas la gauche au deuxième tour » qu’il fallait lire. La gauche, elle avait bossé pendant cinq ans, pas assez, bien sûr, les petits Lu s’en souviennent encore, mais globalement, pas si mal, peut faire mieux, mais pas si mal. Sans trop de soucis, la gauche pouvait, devait gagner. Jospin, pas franchement charismatique, d’accord, mais bon, lui ou un autre, ce qui comptait, c’est que la gauche gagne. Si on remet tout ça à plat, on pourrait presque penser que ce borgne-là, on l’avait bien catapulté là où il était désormais : au deuxième tour. Parce que Chirac, face à la gauche, il n’était pas si sûr de le gagner, son « boulot pour encore cinq ans ». Alors, si on s’était arrangé pour lui mettre un adversaire « jouable » ? Ca ne paraît même pas de la fiction, finalement. Cinq ans plus tard, voilà que ça recommence : des bagarres dans le métro. Pourquoi ? Un type qui saute le portillon, et ça se transforme en bataille rangée… T’en as vu, des gars qui resquillent ? Tous les jours, et même plein. Mais des qui se font jeter à terre par les archers du Roy, menotter, cabosser, pour un passage au black au dessus de la barrière, ça on n’a jamais vu. Qu’est-ce qu’on essaie de nous montrer ? Qu’ils sont efficaces, les pandores ? On savait, merci. Mais une petite piqûre de rappel, ça ne fait jamais de mal ! Au cas où certains auraient eu envie de voter pour le Béarnais. Maintenant, il y aurait plus tordu, comme théorie : une nouvelle façon d’amener le borgne au deuxième tour ? Parce que contre celui-là, même un chien coiffé gagnerait, alors Sarko, tu penses ! Par contre, face à Bayrou, pas sûr, pas sûr du tout… Ca me laisse rêveuse, cette échauffourée ratpienne. Trop facile ! On rajoute les injures contre le ci-devant ministre de l’intérieur (et des cultes, ne jamais oublier de le repréciser, si ça ne sert pas, ça soulage !), histoire de bien stigmatiser les méchants, et le tour est (presque) joué… On en reparlera, à l’occasion !
brigitte blang pour prs 57