Cheminots allemands interdits de grève
Berlin. Le choix de la répression judiciaire contre un mouvement qui s’annonçait aussi inédit que massif.
Les attaques contre le droit de grève se suivent en Europe. Après l’offensive conduite en France par Nicolas Sarkozy pour l’instauration d’un « service minimum », c’est sur un simple arrêt de justice hier que le déclenchement imminent de la grève des cheminots allemands (voir l’Humanité d’hier) a été empêché. Le tribunal du travail de Nuremberg a interdit en référé jusqu’au 30 septembre le mouvement des conducteurs de trains et des personnels roulants qui devait commencer dans les heures qui viennent par d’importants débrayages touchant le fret avant de s’étendre lundi prochain au trafic passagers, si aucun accord n’était trouvé d’ici là, avait indiqué le syndicat GDL. Le tribunal a fondé sa décision sur le fait que l’économie allemande subirait un « énorme dommage. »
Les cheminots, qui s’étaient prononcés lundi au sein de leur organisation syndicale à plus de 95 % pour le déclenchement du mouvement, réclamaient de fortes hausses de salaire (jusqu’à 31 % d’augmentation) après plus d’une décennie d’austérité depuis le lancement du processus de privatisation du service public. Ils ont fait appel de la décision de justice et décidé de suspendre leur mouvement dans l’attente du verdict définitif du tribunal. Tout en indiquant qu’il n’était pas question de renoncer à leur droit de grève, ils maintiennent leur mobilisation et envisagent, dans l’intervalle, « d’autres formes d’action ».
En fait les pressions de toutes sortes s’accentuaient, ces dernières heures sur GDL. Hartmut Mehdorn, le patron de
Les raisons d’un tel acharnement sont très facilement repérables. À l’heure où la belle unanimité autour de la privatisation en cours, objet d’un consensus entre patronat, élus et « partenaires sociaux » (la direction de la confédération syndicale DGB y est favorable), a tendance à se fissurer, les cheminots, radicalement opposés au processus, font figure d’insupportables empêcheurs de tourner en rond. Et la fébrilité des différents acteurs s’accroît alors que les échéances approchent (49 % du capital de l’entreprise doit être mis en Bourse l’an prochain). D’autant que l’opinion se montre de plus en plus réservée sur le passage du service public dans les mains du privé et que plusieurs élus régionaux en contestent désormais ouvertement le bien-fondé.
Bruno Odent (dans l'huma d'hier)