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le blog de brigitte blang

l'actualité politique vue par une militante de gauche.


Une fanm doubout

Publié le 29 Novembre 2014, 00:00am

Catégories : #histoires et histoire

 29 novembre 1802 : exécution de Solitude, esclave et rebelle en Guadeloupe.

 

En 1772, une petite fille conçue au cours du voyage sans retour de Gorée à l’enfer de l’esclavage aux Antilles, vient au monde en Guadeloupe. Un bébé né du viol de sa mère par un marin français. Rosalie, une petite métisse, bien mal aimée et abandonnée. Mais le désamour souvent forge des caractères trempés.

Atavisme indépassable, Rosalie passe de maitre en maitresse. Vendue, revendue, jamais défaite, elle s’invente une identité. Elle devient Solitude.

Lorsqu’en février 1794, la Convention vote enfin l’abolition de l’esclavage, son maitre, le chevalier Dangeau, prend la fuite. Les propriétaires blancs n’ont pas tous, c’est peu de le dire, accueilli avec enthousiasme l’idée de voir partir une main d’œuvre si bon marché ! La lutte ne fait que commencer, malgré la force de la loi. Solitude, habitée de rêves de révolte, rejoint la communauté marron des hauteurs de Goyave. Sa liberté et sa citoyenneté française toutes neuves lui donnent même le droit d’aimer Maimouni, un garçon tout juste arrivé d’Afrique.

1802 arrive vite, et Napoléon, amoureux lui aussi, rétablit la traite et l’esclavage. Un certain général Richepanse est envoyé aux îles pour restaurer l’ordre, mis à mal par tous ces « nègres bien ingrats », lesquels d’ailleurs, ayant goûté à la liberté, n’entendent pas retomber en servitude sans combattre. Louis Delgrès prend la tête de la rébellion. Solitude est de toutes les luttes. Pourtant enceinte, elle se bat avec acharnement. Elle se bat pour que l’enfant qu’elle porte naisse libre. Le 28 mai 1802, les derniers rebelles préfèrent se faire exploser dans le fort Saint-Claude que de capituler devant les soldats français. Solitude s’échappe avant d’être capturée au cours d’une battue. Condamnée à la pendaison, elle ne va être exécutée que le 29 novembre, au grand mât du supplice, en criant : « Vivre libre ou mourir ! ». Au lendemain de la naissance de son fils, aussitôt revendu à un colon. Il aurait été stupide de laisser perdre cette future force de travail…

Aujourd’hui, au Sénat, au-dessus du siège de Victor Schoelcher, qui abolit pour toujours l’ignominie de l’esclavage en France, se trouve une statue. Celle de la Mulâtresse Solitude, une femme de courage, une « fanm doubout », devenue une légende.

brigitte blang

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