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le blog de brigitte blang

l'actualité politique vue par une militante du parti de gauche.


remettre l'école au débat

Publié le 15 Septembre 2010, 23:00pm

Catégories : #école

Placer l’éducation au service d’une nouvelle émancipation

 

Par François Cocq, secrétaire national à l’éducation du Parti de gauche, et

Francis Daspe, secrétaire général de l’Agaureps-Prométhée.


Pourquoi la question éducative est-elle au centre de tout projet de transformation sociale?

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« Après le pain, l’éducation est le premier besoin d’un peuple », proclamait Danton. Nous reprenons pleinement à notre compte cette maxime, plaçant au cœur de tout projet de transformation sociale la question éducative. Et ceci pour trois raisons.

L’école est tout d’abord le cœur d’un enjeu majeur : la défense et la promotion des valeurs républicaines. Institution de la République par excellence, elle est garante des valeurs fondant l’exigence républicaine, aujourd’hui fortement remise en question : laïcité malmenée, mixité sociale attaquée avec la suppression de la carte scolaire, liberté sérieusement écornée avec les tentatives de criminalisation de la contestation, défense de l’intérêt général incompatible avec l’élaboration d’une politique de classe, promotion d’un esprit critique conforme aux impératifs d’une citoyenneté éclairée ébréchée par le dogme libéral.

L’école constitue ensuite un levier incomparable pour déconstruire l’idéologie dominante impulsée par le marché roi. L’urgence est la reconquête de l’espace démocratique perdu face à l’hégémonie de la sous-culture dominante imposée depuis des décennies par les libéraux dont on constate les ravages en termes de rapport à l’intérêt général. L’école n’est pas un sujet neutre. La quasi-totalité des réformes recèle une visée éminemment politique contribuant à dessiner un véritable projet de société: introduction des principes de mise en concurrence et d’autonomie découlant des recommandations européennes du processus de Bologne ou de la stratégie de Lisbonne, marchandisation remettant en question la gratuité et l’égalité, avalanche de suppressions de postes depuis plusieurs années dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, démantèlement des statuts des personnels faisant office de Code du travail pour la fonction publique, instauration d’un mode de gestion managérial visant à transformer l’école en entreprise, programmes ne donnant qu’une vision parcellaire et idéologiquement orientée de la réalité, etc. N’en doutons pas, face au libéralisme triomphant, c’est à un combat culturel auquel nous sommes confrontés au travers de la question scolaire.

La finalité de notre système éducatif consiste enfin à œuvrer inlassablement à l’émancipation. Nous nous fixons pour horizon, contre les vents dominants de l’individualisme, l’émancipation tant individuelle que collective. Cela passe par une double ambition : former des citoyens et contribuer à la transformation sociale.

Former des citoyens, c’est donner à chacun la possibilité de penser par lui-même afin d’accéder à l’autonomie, conformément à l’idéal des Lumières : les savoirs libèrent quand l’ignorance asservit. L’actuelle vision minimaliste et utilitariste, simple déclinaison du mépris de la culture affiché ostensiblement au plus haut sommet de l’État, contrevient radicalement à cet objectif libérateur. L’école doit plus que jamais s’attacher à son rôle de socialisation indispensable au vivre-ensemble qui passe par la lutte contre les préjugés les plus rétrogrades et les conformismes les plus aliénants rongeant notre société.

Parallèlement, l’école peut et doit participer à l’ambition de transformation sociale à laquelle nous n’avons pas renoncé. Notre choix va résolument dans le sens de l’élévation sociale de l’ensemble d’une classe. Celle-ci passe par la démocratisation longtemps vantée, jamais véritablement réalisée. Les formations professionnelles et technologiques, qui regroupent plus de 50 % des élèves, doivent ainsi se fixer des objectifs aussi ambitieux en termes d’exigences et de réussite que les filières générales. L’enseignement supérieur, tenté par la sélection libérale, doit être le terreau de l’ouverture à toutes les catégories sociales. Les qualifications, passeport pour la reconnaissance par les conventions collectives, doivent rester la pierre angulaire de tout projet qui exige d’agréger les savoirs et le débouché professionnel.

Prenons cependant conscience que, si l’école peut beaucoup, elle ne peut pas tout, et certainement pas se substituer aux capitulations ou aux défaillances de l’action du politique qui laisse le marché imposer ses diktats. La valorisation des diplômes dépend aussi de mesures législatives relatives aux salaires et au droit du travail. Démasquons à cet effet la stratégie visant à l’individualisation croissante des mesures en faveur de la jeunesse qui relève de l’imposture : le but est de se donner bonne conscience en arguant de la réussite de quelques éléments pour mieux se désintéresser de la masse des autres, abandonnés à leur sort au motif qu’ils ne seraient pas suffisamment méritants.

Un gouvernement de rupture à vocation majoritaire doit faire sienne la formule de Condorcet qui voulait former « des citoyens qui ne s’en laissent pas conter mais qui entendent qu’on leur rende des comptes », autrement dit construire « un peuple conscient et debout ». C’est de cette sorte que l’école contribuera à faire émerger l’implication populaire indispensable au succès du nécessaire projet de transformation sociale.

 

Tribune parue dans l’Humanité du 14 septembre 2010

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