Pour commencer il s’agit donc pour nous de comprendre ce qui s’est passé et se déroule encore sous nos yeux.
Les mutations du capitalisme de la fin des années 70, les changements géopolitiques majeurs de l’après-guerre froide, le triomphe « historique » du modèle démocratie libérale/économie de marché, ont brisé le fragile rapport de forces social qui existait dans les pays développés.
La formidable revanche des détenteurs de capitaux contre l’Etat social se traduit par l’accaparement, à leur seul profit, de la progression de la valeur ajoutée qui autrefois revenait au travail et par un déséquilibre croissant dans la répartition des richesses. L’abandon de tout volontarisme macro-économique, la libéralisation des marchés financiers comme l’entrée dans la division internationale du travail de
La gauche sociale-démocrate n’est pas exempte de responsabilités, ni en France, ni ailleurs.
La création de gauches « modernes », valorisant le sociétal (dans un sens laxiste ou autoritaire, peu importe) pour ne plus rien dire du social, justifiant la remise en cause des services publics au nom des rentabilités à court terme, théorisant l’inéluctabilité de la fragmentation de la société ou transformant la construction européenne en dogme utilisé comme idéologie de remplacement, a été le signe de cet affaiblissement. Petit à petit s’est ainsi imposé un modèle ne visant plus à construire démocratiquement et progressivement un rapport de forces plus favorable au travail mais à adoucir et à humaniser une domination capitaliste toujours plus réelle mais qui disparaît dans le firmament des « contraintes ».
La gauche est en crise, d’abord parce qu’elle est persuadée de la validité des axiomes de l’adversaire.
La gauche est aujourd’hui vaincue car elle ne sait plus pour quoi et pour qui elle travaille, car elle n’a pas encore conçu un ensemble de politiques et de solutions pour atteindre ses objectifs dans un contexte hostile à leur réalisation même ! La vieille opposition entre gauche de « l’idéal » et gauche du « réel » n’est plus d’actualité. Le socialisme ne serait pas capable aujourd’hui de décrire l’utopie qu’il sert ni même de convaincre qu’il peut améliorer de façon décisive le réel. De ce point de vue, nous sommes dans le « perdant-perdant ! »
Il faut donc reconstruire.
Partout, les appels solennels à la refondation de la gauche se multiplient. On somme celle-ci de se moderniser et on s’inquiète que sa composante socialiste soit si réfractaire à une mutation opérée par toute la social-démocratie européenne. On moque son archaïsme. On raille ses querelles. Les rénovateurs de tous poils s’organisent. Pour aller où ?
Vers la modernité clament certains. Modernité qui tient grosso modo en deux objectifs, l’un doctrinal qui sans renoncer à l’ambition de justice sociale réclame la conversion urgente aux principes économiques libéraux, l’autre structurel qui appelle une adaptation impérative de la gauche aux institutions de la cinquième république par la présidentialisation de sa principale formation – le parti socialiste – sous la férule d’un leadership fort.
Vers la radicalité assurent d’autres. Radicalité qui s’identifie sur le plan doctrinal à la rupture avec la construction européenne et la mondialisation, et sur le plan structurel à l’émergence d’une force antilibérale concurrente d’un parti socialiste réduit à sa composante sociale libérale.
Chacune de ces voies est une impasse. Nous voulons forger un alliage plus sûr et plus exigeant, soustrait aux contingences du calendrier politique immédiat.
D’un certain point de vue, la victoire de Nicolas Sarkozy est riche d’enseignements. Qu’a-t-il fait d’autre que d’assumer la reconstruction idéologique de