Une loi d’affichage aux conséquences dangereuses
Absence de toute étude d’impact et ignorance des précédents étrangers
Pourtant les conséquences risquent d’être catastrophiques notamment pour la population carcérale. Déjà, depuis 2002, les diverses mesures Sarkozy ont mécaniquement accru de plus de 10 000 le nombre de prisonniers.
Cette politique est d’autant plus aberrante qu’elle a déjà montré ses limites dans d’autres pays. Sarkozy applique aveuglément la théorie dite de la « tolérance zéro » sans tirer aucune leçon de ses échecs. Au Royaume-Uni, la population carcérale s’est envolée depuis 1997 sous l’impulsion de Blair (de 61 000 à 77 000 détenus, avec une prévision de 90 000 en 2010) alors que le nombre de condamnations a baissé. Cette réponse carcérale systématique pose le problème d’un système pénal dont les sanctions ne sont plus du tout proportionnées et dont l’effet dissuasif est donc de moins en moins efficace. L’Australie, qui avait instauré des peines planchers en 1996 s’est retrouvée dans la même impasse carcérale sans baisse du taux de délinquance : l’essentiel des mesures sur les peines planchers ont ainsi été retirées en 2000 !
Scepticisme des observateurs et magistrats
L’instauration des peines planchers réduit la marge d’appréciation des magistrats. Il s’agit donc d’une mesure de défiance à leur égard, puisqu’ils sont jugés trop « laxistes » par Sarkozy. Le principe de la peine plancher et son exception sur motivation spéciale aura pour effet de rendre les juges responsables, en cas échéant, de la récidive postérieure. Les médias se chargeront de souligner la première affaire de récidive après motivation spéciale des juges, et ceux-ci ne sortiront plus du principe de la peine plancher….
Face aux conséquences annoncées de la loi, le gouvernement argue de sa visée dissuasive… Or l’absence de vertus dissuasives des peines n’est plus à prouver…c’est un principe que l’on pensait admis depuis l’abolition de la peine de mort en 1981 ! De plus, de nombreux acteurs de la scène judiciaire pointent que plutôt que de miser sur une intériorisation de la norme, et surtout le la peine encourue par les populations délinquantes, il serait plus judicieux de mettre des moyens sur la prévention…
De l’Etat social à l’Etat pénal
Dans la stratégie libérale sécuritaire de Sarkozy, cette loi ne constitue qu’un pas de plus dans le désengagement de l’Etat Social au profit de l’Etat Pénal. Et pas par n’importe quelle politique pénale : l’esprit de la loi revient au tout enfermement qui prévalait au milieu du 19ième siècle, enterrant plus d’un siècle d’avancées des sciences criminelles, un demi-siècle de justice des mineurs et 32 ans de politiques de diversification des peines.