L’ère du possible
Ce dernier éditorial avant les départs estivaux achève l'année scolaire sur une note incertaine. On ne peut dire pour l’heure laquelle dominera à la rentrée des deux tendances simultanées qui travaillent la gauche : poursuite de la décomposition d’un côté, premiers signes de reconstruction de l’autre.
Commençons par la décomposition. Les débauchages et autres manœuvres visant à désarticuler l’opposition socialiste fonctionnent à plein. Elles commencent à produire leur effet, au-delà des ralliés, dans le gros de la troupe. Désarçonnés par ces désertions, KO debout, d’éminents socialistes sont désormais convaincus que l’urgence est d’en rabattre dans leur opposition à la droite. En témoignent les déclarations convergentes de Royal, Collomb, Valls, Lang… qui rivalisent de formules pour réclamer une opposition modérée. Des socialistes rendent hommage à Sarkozy dans la presse, d’autres affaiblissent par avance toute opposition résolue en prétendant qu’elle serait politicienne. Tous rendent les armes au moment même où Sarkozy conduit une offensive brutale au Parlement, avec les lois sur les peines planchers, l’autonomie des universités et le service minimum, met en œuvre la suppression de la cartescolaire, viole le « non » des Français avec son nouveau traité européen et ne renonce en rien à son idéologie libérale-sécuritaire. On pourrait faire la liste de ces innombrables petites capitulations. N’en retenons qu’une : le refus de s’opposer au cœur du projet de loi sur les universités. Celui-ci n’est pas la sélection en master, c’est l’autonomie comme moyen de mise en concurrence des établissements. Car les néolibéraux n’ont nul besoin de revenir sur la démocratisation de l’accès à l’université. Ils atteindront le même résultat par l’explosion des inégalités entre établissements, qui conduira de fait à une inégalité entre diplômes. D’autant que cette autonomie ouvre la voie à un futur grand marché de l’enseignement supérieur, nouvelle source de profits où régnerait la « concurrence libre et non faussée » et où toute règlementation nationale apparaîtrait comme une survivance archaïque.
Mais on perçoit aussi les ferments de la recomposition. Nous sommes très frappés de l’intérêt suscité par notre proposition d’une force nouvelle à gauche, présentée dans ces colonnes la semaine dernière. Les très nombreux téléchargements du document « la gauche d’après » sur le site de PRS (La gauche d'après (pdf)), les retours extrêmement positifs, prises de contact, demandes d’adhésion à notre association témoignent d’une disponibilité remarquable pour cette perspective. De plus, une convergence s’opère déjà avec d’autres. Samedi dernier, je participais à la réunion de Maintenant à gauche, carrefour de militants et responsables issus des collectifs unitaires antilibéraux, parmi lesquels Eric Coquerel, président du Mars-Gauche républicaine, Claude Debons, ancien coordinateur de l’appel du 29 mai et Christian Picquet, animateur de la sensibilité Unir de
françois delapierre dans À gauche