C'était un lundi...
À la fin de la récré, Rémy est venu dans ma classe. Il avait entendu les infos à la radio. Ça m’a fait comme un truc bizarre dans la tête. Comme quand on t’apprend le départ d'un proche. À partir du lendemain, on a acheté tous les journaux qui sont parus, je les retrouve ce matin. Quelle drôle d’idée, quand même, cette accumulation de souvenirs en papier…
Ce qui reste aussi, c’est cet hommage que le recteur avait ordonné, deux minutes de recueillement avec les élèves. J’ai désobéi. Oui, j'ai du mal avec les injonctions ! À la place, on a écouté des chansons, dans toutes les classes, de celles qu’on aurait pu appeler « les Années Mitterrand » : Saïd et Mohamed, Né quelque part, l’Aziza, Tu touches pas à mon pote, Noir et Blanc, et d’autres encore. C’était trop bête ce silence artificiel, les gamins, c’était plus important de leur raconter qu’il avait aimé les chanteurs, que le rock était entré à l’Élysée pendant qu’il y habitait, que tous ces mots n’étaient pas innocents, qu’il y avait là derrière autre chose que des rythmes et des guitares.
Ça a plutôt bien marché ce petit hit-parade en forme de déférence. Ce qui reste aussi, c’est que le Parti, en Moselle, avait choisi la cérémonie religieuse. Étrange, tous ces laïques dans une église. On n’a pas bien compris…
Ce qui reste aujourd’hui c’est une certaine idée de la liberté, c’est aussi ce témoignage de Jean Poperen, plus que jamais d’actualité, à l’heure où, décidément, la politique change de dimension.
Je me souviens. C'était un lundi.
Jean Poperen : «… François Mitterrand, c’est d’abord l’homme du rassemblement. Il a toujours considéré que le mouvement socialiste avait besoin de tous, qu’il devait assumer les différences… Démentant ceux qui ne croyaient pas à l’union de la gauche –souvent parce qu’ils n’en voulaient pas- il a fait triompher ces deux exigences inséparables : ne jamais renoncer à s’unir, surmonter les intransigeances et les sectarismes, mais ne rien céder sur l’exigence démocratique… »