30 octobre 1918, révolution en Allemagne
1915. Alors que la guerre fait rage, Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg fondent la Ligue spartakiste. Avec Clara Zetkin, ils ont été poussés hors du Parti social-démocrate, le SPD, par ses dirigeants les plus « modérés », dont Ebert. Leur groupe reste minoritaire dans l’opinion. Et le 1er mai 1916, Liebknecht est arrêté et emprisonné, après un discours pacifiste prononcé à Berlin.
1917. La guerre s’éternise. Les soldats au combat, et les peuples à l’arrière, sont épuisés, démoralisés par ce conflit sanglant. Des centaines de soldats ont été fusillés « pour l’exemple » dans les armées anglaise, française et allemande.
1918. Dès le printemps, des grèves et des mutineries éclatent en Allemagne. Les négociations de paix à Brest-Litovsk laissent entrevoir l’espoir d’une paix rapide. Dans les usines, on élit des délégués des ouvriers aux revendications très claires : la paix, bien sûr, mais aussi des droits nouveaux pour les travailleurs, la liberté pour les prisonniers politiques, et un ravitaillement régulier et suffisant.
Mais ce n’est qu’à l’automne que va se lever un véritable élan révolutionnaire. Le vent de la défaite souffle, qui va grandir et se muer en tempête. Les Allemands découvrent toute l’étendue du désastre. Tant de sacrifices consentis en vain…
Le mouvement part de Kiel, le grand port de la Baltique. La flotte doit appareiller. Les matelots se mutinent, et hissent le drapeau rouge. Ils exigent la libération de leurs camarades emprisonnés, et menacent de faire tirer sur la ville. Le gouverneur cède très vite.
Les ouvriers leur emboitent le pas, déclenchant la grève le 30 octobre. Des conseils ouvriers ainsi que de soldats sont élus. Le mouvement gagne le pays tout entier, réclamant l’abdication de Guillaume II. Laquelle intervient le 9 novembre.
Parmi les grévistes et les militants, beaucoup viennent du SPD. Ils attendent de voir jeté à bas le capitalisme, fauteur de cette guerre implacable. Leurs dirigeants, et particulièrement Ebert, ne voient pas les choses du même regard. Ils ont voté la guerre en 14. Ils ne l’oublient pas. Ils ne veulent pas de cette révolution qu’ils n’ont pas décidée. L’affrontement avec les insurgés devient inévitable. Car les nouvelles venues de Russie laissent espérer un soulèvement général dans toute l’Europe. Hélas… la suite fait mentir l’espoir.
1919. En janvier, Liebknecht et Rosa Luxemburg sont arrêtés et assassinés. Et au printemps, c’est bien avec l’onction du SPD que les corps francs contre-révolutionnaires répriment violemment les insurrections populaires.
Et en mai, la contre-révolution écrase les derniers espoirs spartakistes.
Mais c’est pourtant bien cette révolution, née 6 mois auparavant sur les bords de la Baltique, qui a sonné la fin de la boucherie globale.
Si l’année 2018 est celle du centenaire de la fin des combats, tâchons d’en faire celle de la lutte contre toutes les guerres.
brigitte blang